Après une première édition réussie de la Semaine internationale du dépistage en 2020, Coalition PLUS revient à la charge, avec encore plus de pays et d’associations participantes. Cette année, nous rappelons que le dépistage est la clé pour accéder aux moyens de prévention et au soin et ainsi, mettre fin au sida. Mais pour mieux cibler les actions en direction des populations-clés, les interventions des pairs-es éducateurs-rices sont indispensables. Ils et elles se saisissent de la Semaine internationale du dépistage pour revendiquer la reconnaissance de leur statut. Discussion avec Hakima Himmich, Présidente de Coalition PLUS.
Dans quel but Coalition PLUS a commencé à organiser la Semaine internationale du dépistage?
Nous avons lancé la Semaine internationale du dépistage (SID) en 2020 parce que nous croyons en la capacité des réseaux communautaires d’être à l’avant-garde des pratiques, non seulement de dépistage, mais aussi de mobilisation des communautés qui demeurent dans les angles morts des systèmes de santé publics. L’épidémie dynamique reste bien active parce que des personnes n’ont pas accès au dépistage ou à des traitements adéquats, souvent à cause des discriminations et de la stigmatisation. Ces populations clés demeurent en marge des soins auxquels elles ont pourtant droit. Nous souhaitons affirmer leur place centrale dans la riposte contre le VIH et les hépatites virales. A travers la SID, nous voulons instaurer un rendez-vous annuel pour mettre un coup de projecteur sur le dépistage communautaire, parce qu’il est mené par et pour les premiers-ères concernés-es et que, malgré son sous-financement, il se distingue par ses pratiques novatrices et sa capacité à toucher les communautés.
En quoi la SID a-t-elle été un succès en 2020 ?
La Semaine internationale du dépistage 2020 nous a donné l’opportunité de mobiliser les acteurs des sociétés civiles sur le terrain dans tous les pays participants, en plus d’augmenter considérablement la visibilité de Coalition PLUS, de ses membres et de ses partenaires. La force de notre réseau international réside dans le fait que nos actions sont coordonnées à plusieurs niveaux, mondial, régional et national, mais aussi par sphère linguistique. Concrètement, ce mode d’organisation en réseaux permet de renforcer notre impact et notre portée.
En 2020, les actions de sensibilisation et de dépistage par et pour les populations clés ont été un succès à l’échelle du réseau. Au total, près de 24 000 tests ont été réalisés dans les 32 pays participant à l’opération. Et le ciblage sur les populations clés a une nouvelle fois démontré sa pertinence, avec des taux de positivité généralement bien supérieurs aux prévalences dans la population générale. Ainsi, 2,6% des tests VIH, 5,2% des tests VHB et 3,8% des tests VHC étaient positifs. Nous avons pu atteindre des chiffres aussi impressionnants grâce au travail essentiel des pairs éducateurs-trices, qui ont dépisté autant en centre qu’en hors les murs, tout en respectant bien sûr les gestes barrières.
Quel a été l’impact de la covid sur les dépistages au sein des associations?
Nous traversons une crise sanitaire mondiale et pour la première fois en 20 ans, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme a enregistré un recul des dépistages du VIH de 22% partout dans le monde. Cela nous donne de bonnes raisons de craindre une recrudescence de l’épidémie, qui aurait des conséquences catastrophiques pour les communautés les plus vulnérables. Dans ce contexte, nous devons nous inscrire dans une démarche de rattrapage et tout faire pour que les premiers et premières concernés-es aient à leur disposition les outils nécessaires pour combattre le VIH là où il se propage le plus largement. Nous ne pouvons pas tolérer les barrières inutiles au dépistage des populations clés : le refus de démédicaliser et la non-reconnaissance du travail des pairs-éducateurs et pairs-éducatrices en font partie.
Quelles seront nos activités pour 2021?
Tout comme l’an passé, avec les associations sur le terrain, nous allons nous saisir de cette Semaine pour informer et sensibiliser les communautés les plus éloignées des systèmes de santé au dépistage du VIH, des hépatites virales et des cancers liés au papillomavirus humain (HPV). En ce sens, nos membres et partenaires mèneront tout au long de cette Semaine des actions de dépistage, organiseront des formations aux TROD (tests rapides d’orientation diagnostique) et dénonceront les entraves à la santé causées par les discriminations et la stigmatisation. En parallèle, nous profiterons de la visibilité offerte par cette opération de grande ampleur pour faire valoir nos revendications de plaidoyer, notamment la reconnaissance de la place centrale des agents de santé communautaires dans l’accélération de la riposte mondiale au VIH.
L’expertise de nos pairs-es éducateurs-rices est un levier majeur pour atteindre les objectifs mondiaux de lutte contre le VIH : ce sont elles et eux qui pallient les manques des systèmes de santé classiques auprès des populations les plus touchées par l’épidémie. Nous prouvons années après années que les acteurs communautaires ont une valeur ajoutée essentielle résidant dans leur connaissance des réalités du terrain. Les chiffres le montrent : que ce soit au Maroc, en Equateur, ou encore au Mali, nous dépistons bien plus de personnes séropositives que les systèmes de santé classiques ! Et à l’inverse, la fermeture des services communautaires en réponse à la pandémie de Covid-19 a très certainement contribué à la baisse du nombre de dépistages dans le monde.
Qu’est-ce que Coalition PLUS réclame cette année?
Nous travaillons toujours pour lever les barrières d’accès au dépistage en valorisant l’expertise communautaire. Dans beaucoup de pays, le rôle des agents de santé communautaires demeure peu valorisé. Ces travailleurs-euses de l’ombre ne bénéficient en rien de la reconnaissance qu’ils et elles méritent et sont maintenus-es dans la précarité. Cette situation amoindrit notre portée sur l’épidémie. L’éducation par les pairs-es est parfois considérée comme du bénévolat que certain-es feraient par altruisme, et non comme un travail essentiel dans l’avancement de notre lutte. Les travailleurs-euses communautaires sont encore trop souvent rémunérés-es via des indemnités circonstancielles, ce qui est intenable pour les organismes qui les emploient et engendre des défis de taille qui pourraient être évités, comme un fort turn over des ressources expertes et une insécurité plus forte sur le terrain.
Pour lever ces barrières, il est essentiel d’obtenir un statut d’interlocuteur direct avec les décideurs pour leur démontrer que nos pratiques sont non seulement novatrices mais efficaces et inclusives, même avec un financement insuffisant. Notre but est qu’ils accordent leur pleine confiance aux premiers concerné-es, que nous représentons, et qu’ils financent adéquatement les structures communautaires, car nous savons que nous détenons les solutions pour mettre fin au sida.
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